Mis à jour le 3 avril, 2024
Un devis n’est pas un simple tableau d’information sur toutes les phases d’un chantier avant sa réalisation. Il s’agit d’un document encadré par la réglementation qui devient, une fois approuvé par le maître d’ouvrage, un véritable contrat.
Mentions obligatoires, cadre d’application, modifications… Revue en détail d’un document indispensable.
Qu'est ce qu'un devis ?
Il s’agit en fait d’un descriptif estimatif mais détaillé, étape par étape, de toutes les prestations réalisées par un professionnel. Son utilisation se distingue des marchés à forfait, qui fixent globalement et sans détails le prix des travaux à réaliser. Lequel système peut parfois être avantageux pour le client mais n’a pas le mérite de la clarté concernant tous les cas de figure que rencontrera le prestataire de service sur le chantier.
Au contraire, le devis permet de vérifier dans le détail la qualité, la quantité des matériaux nécessaires aux travaux (construction, rénovation, entretien, etc.) commandés, la main d’œuvre nécessaire, ainsi que le prix pratiqué par les professionnels sollicités. Pour chacune des indications inscrites, l’artisan devra réaliser l’estimation la plus objective possible.
Selon l’article 3 de l’arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’électroménager, le professionnel doit remettre un devis détaillé préalablement à l’exécution de toute prestation, à la demande du consommateur bien sûr mais, légalement, dès lors que le montant des travaux est supérieur à 150 euros toutes taxes comprises.
Quelles sont les mentions obligatoires qui doivent être inscrites sur le devis ?
L’arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’électroménager (J.O. du 10 mars) répond à cette question dans son article 3.
Selon cette clause, le devis doit comporter les mentions suivantes :
- La date de la rédaction,
- Le nom et l’adresse de la société,
- Le nom du client et l’adresse de l’exécution des travaux,
- Le décompte détaillé, en quantité et en prix, de chaque prestation et produit nécessaire à l’opération prévue en précisant à chaque fois la dénomination, le prix unitaire et la désignation de l’unité de référence pour le calcul (taux horaire de la main-d’œuvre, au mètre linéaire, au mètre carré) et la quantité prévue,
- Les frais de déplacement le cas échéant,
- La somme globale à payer,
- La somme à payer TTC,
- Le taux de TVA,
- La durée de validité de l’offre,
- L’indication si le devis est gratuit ou payant.Les autres mentions rédigées par le prestataire rentrent quant à elles dans le cadre de la discussion avec son client.
Elles font partie des engagements du professionnel et donc de sa responsabilité une fois le devis approuvé. A noter enfin que le devis est rédigé en double exemplaire, chaque intervenant conservant un double du document.
Quelles autres mentions peuvent figurer sur le devis ?
L’article 2 de l’arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’électroménager précise que l’entreprise prestataire est tenue de préciser à son client, avant l’établissement du devis, les éléments suivants :
- Les taux horaires de main d’œuvre toutes taxes comprises,
- La méthode pour calculer le temps passé sur le chantier,
- Les prix TTC des prestations proposées,
- Les frais de déplacement, si besoin est,
- Le caractère payant du devis si celui-ci l’est effectivement et le coût de son établissement,
Les autres conditions de rémunérations possibles si celles-ci existent.L’article 2 indique également qu’en cas de déplacement chez le client, le professionnel doit présenter, «préalablement à tout travail, un document écrit contenant les informations énumérées ci-dessus» avec toutes ces informations. Lesquelles peuvent donc le cas échéant figurer sur le devis.
Dans quelles conditions l'obligation de rédiger un devis ne s'applique pas?
L’arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’électroménager précise les limites du champ d’application du devis. Ainsi, ne sont pas concernées les interventions effectuées en cas de «situation d’urgence absolue», c’est-à-dire quand celles-ci se limitent à faire cesser un danger manifeste pour la sécurité des personnes ou l’intégrité des locaux.
Toutefois, dans ce cadre, les travaux devront faire l’objet d’un ordre de réparation. Il s’agit d’un autre document rédigé avant travaux, prévu par l’arrêté du 2 mars 1990 et qui comprend un état initial des lieux, la motivation de l’appel et les réparations à effectuer.
Quand le devis engage-t-il les deux parties?
Selon l’Agence pour la création d’entreprise (APCE), «dès lors qu’il est daté et signé par le professionnel et le client, le devis a la valeur d’un contrat». En ce sens, il engage la responsabilité du professionnel sur les différents termes inscrits sur le document. Quant au maître d’ouvrage, celui-ci n’est pas tenu de se conformer au devis s’il ne l’a pas validé. D’où l’intérêt de demander plusieurs devis à des entreprises différentes, les comparer et ensuite faire un choix. En revanche, une fois que le client a apposé les mentions manuscrites ‘Devis reçu avant l’exécution des travaux’ et ‘Bons pour travaux’, avec la date et sa signature, il sera alors engagé contractuellement vis-à-vis de la personne en charge des travaux.
Le devis doit-il comporter des dates de début ou fin de chantier ?
Même si la mention n’est pas expressément inscrite dans l’arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’électroménager.
Il existe d’autres dispositions qui obligent le professionnel à s’engager sur les délais.
Ainsi, en ce qui concerne la date de fin de chantier, l’article L114-1 du code de la Consommation explique que «dans tout contrat ayant pour objet la vente d’un bien meuble ou la fourniture d’une prestation de services à un consommateur, le professionnel doit, lorsque la livraison du bien ou la fourniture de la prestation n’est pas immédiate et si le prix convenu excède des seuils fixés par voie réglementaire, indiquer la date limite à laquelle il s’engage à livrer le bien ou à exécuter la prestation». Pour résumer, le devis pour travaux étant considéré juridiquement comme un contrat une fois signé, le professionnel de la construction doit donc faire mention de la date de livraison des travaux.
En ce qui concerne une date de début des travaux, la réponse est moins claire. Aucune mention obligatoire relative au début des travaux n’est indiquée ni dans l’arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’électroménager, ni dans l’article L114-1 du code de la Consommation.
Si l’Agence pour la création d’entreprise (APCE) indique la date de début et la durée du chantier dans les mentions obligatoires du devis, d’autres organismes, comme l’Institut national de la consommation (INC) ou la chambre de métiers du Val d’Oise, expliquent que «les clients doivent prendre la précaution de faire mentionner sur le devis, au moment où il est signé par les deux parties, la durée normale des travaux à compter d’une date fixe». Il s’agit donc de bien vérifier avant signature du devis si cette mention est bien indiquée. Si elle ne l’est pas, il faut la demander même s’il ne s’agit que d’une «précaution». Prudence donc.
Les signataires du devis peuvent-ils revenir dessus, le modifier, voire le rompre ?
Juridiquement, le devis devient contrat quand il est signé par le client et le professionnel en charge des travaux. Ce dernier est donc tenu de respecter sa part du marché, donc chaque mention du document point par point. Il ne peut donc pas réaliser des travaux supplémentaires et en demander paiement sans l’accord du maître d’ouvrage. Celui-ci a parfaitement le droit de refuser le paiement, notamment quand le dépassement est du fait de l’entrepreneur.
Si le professionnel ne tient pas ses engagements selon le devis établi, il peut être forcé par la justice de fournir la prestation, par le biais d’une procédure engagée par le maître d’ouvrage, «si le montant des travaux n’excède pas 7.600 €», selon L’Institut national de la consommation (INC). Le maître d’ouvrage peut même exiger des dommages et intérêts, ajoute l’association de défense des consommateurs, si celui-ci a subi un préjudice du fait du retard de l’exécution.
Le devis peut être par contre modifié sur les prix dans des conditions particulières (voir à ce sujet notre article : ‘Le prix TTC de la facture et celui du devis initial diffèrent. Est-ce normal ?’). Sinon, il convient de faire le point avec l’entreprise en charge des travaux, de négocier, de trouver un terrain d’entente et de rédiger un avenant au devis.
Le particulier a quant à lui la possibilité de résilier le devis/contrat dans un cas précis. L’article L114-1 du code de la Consommation indique que «le consommateur peut dénoncer le contrat de vente d’un bien meuble ou de fourniture d’une prestation de services par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en cas de dépassement de la date de livraison du bien ou d’exécution de la prestation excédant sept jours et non dû à un cas de force majeure».
«Ce contrat est le cas échéant», poursuit l’article L114-1, «considéré comme rompu à la réception, par le vendeur ou par le prestataire de services, de la lettre par laquelle le consommateur l’informe de sa décision, si la livraison n’est pas intervenue ou si la prestation n’a pas été exécutée entre l’envoi et la réception de cette lettre». Pour éviter les ruptures abusives, il existe toutefois un délai de 60 jours ouvrés à compter de la date indiquée pour la livraison du chantier pour faire valoir ce droit. Pour simplifier, en cas de large dépassement, non justifié, des délais d’exécution, le contrat initial est caduc.
Quelle est la valeur d'un devis en ligne ou obtenu par correspondance ?
Qu’on le reçoive via e-mail ou courrier postal ne change rien ; ce devis doit comporter les mentions obligatoires prévues par la loi. En effet, ces documents sont assimilés par l’article 4 de l’arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’électroménager à de la publicité «permettant une commande en distance». Dans ce cadre, le devis électronique devra donc comporter les mentions suivantes :
- le nom et la raison sociale et l’adresse de l’entreprise,
- son numéro d’inscription au registre du commerce ou au répertoire des métiers,
- Les taux horaires de main-d’œuvre toutes taxes comprises pratiqués pour chaque catégorie de prestation concernée ou les prix unitaires, quelles que soient les unités,
- les frais de déplacement, lorsque les entreprises se rendent au domicile du consommateur,
- Le caractère payant ou non du devis,
- Le cas échéant, toute autre condition de rémunération.Le devis peut-il être payant ? Rien n’interdit à un artisan de proposer des devis à caractère payant. Même si l’Institut national de la consommation (INC), estime «qu’en principe, le devis est gratuit», le prestataire peut le faire payer «notamment en cas de déplacement et/ou d’études approfondies de la situation», toujours selon l’organe de défense des consommateurs.Néanmoins, par deux fois, l’arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’électroménager indique que le client doit être prévenu du caractère payant du devis avant son établissement, notamment dans le cadre des informations données, par écrit, préalablement aux travaux, par l’entreprise prestataire. (Voir notre article ‘D’autres documents peuvent-ils accompagner le devis?’). Idem lors de la rédaction du devis en lui-même puisque la mention du coût occasionné doit donc apparaître.Sinon, «à défaut d’une information claire sur ce point, le consommateur pourra refuser de payer un devis dont il apprend postérieurement qu’il était payant», explique l’INC. L’association précise également que le professionnel peut proposer de déduire le coût d’établissement du devis du reste des travaux. Là encore toutefois, il ne s’agit en aucun cas d’une obligation.
Le prix TTC de la facture et celui du devis initial diffèrent. Est-ce normal ?
Cela peut arriver. Un devis exact étant rare, il peut arriver que les prix entre le devis et la factures soient différents. Ce cas de figure se produit quand le professionnel insère dans le devis une clause d’indexions, permettant de modifier automatiquement les prix à partir d’un coefficient définit par la loi. Ce dispositif permet alors à l’entrepreneur de prendre en compte l’évolution du coût de la main d’œuvre ou encore les prix des produits utilisés.
Même sans cette clause, assure l’Institut national de la consommation (INC), l’artisan peut dans une certaine mesure demander un supplément : «le devis est censé rester valable, sans possibilité de variation, pendant un délai jugé raisonnable par les tribunaux (environ trois mois). Au-delà, le consommateur pourra se voir opposer une augmentation des tarifs, sous réserve du respect du régime des prix».
Autant donc envisager cette hypothèse avec l’artisan en amont pour, le cas échéant, inscrire les conditions de cette clause d’indexions sur le… devis.
Quels sont les recours en cas de contestation ou de litige avec l'entrepreneur ?
En cas de problèmes dans l’exécution des travaux par exemple, ou encore un litige sur les prix, il existe plusieurs organismes de concertation pour régler le conflit avant de passer par les tribunaux :
- la Direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DDCCRF) peut aider les consommateurs pour les manquements aux mesures liées à l’arrêté du 2 mars 1990 relatif à la publicité des prix des prestations de dépannage, de réparation et d’entretien dans le secteur du bâtiment et de l’électroménager.
- Le conciliateur dans les tribunaux d’instance peut aider à régler les différends à l’amiable. Nommé par le président de la cour d’appel, il peut être saisi par simple courrier. Ses avis par contre ne sont pas contraignants.
- Les associations de consommateurs qui peuvent aider dans les démarches juridiques moyennant une cotisation, les chambres syndicales et les organismes professionnels qui peuvent également intervenir dans des cas particuliers.
- Si la phase judiciaire est inévitable, il convient alors de ne pas se tromper de tribunal :
- Le tribunal d’instance est compétant pour les sommes allant jusqu’à 7.600 euros. Jusqu’à 3.800 euros, il existe une procédure simplifiée auprès du greffe du tribunal. Entre les deux sommes sus-citées, il faut s’en remettre à la procédure ‘normale’ avec nécessité d’assigner l’adversaire avec un acte d’huissier.
- Le tribunal de grande instance est compétent au-delà de 7.600 euros. Dans ce cadre, la présence d’un avocat est nécessaire.Si après exposé du cas devant les juges, la mauvaise foi du professionnel a été prouvée, le juge peut alors enjoindre l’entrepreneur récalcitrant à effectuer les travaux, voire verser des dommages et intérêts. S’il ne termine pas les travaux, les juges peuvent autoriser le maître d’ouvrage à recourir aux services d’une nouvelle société pour achever les travaux.